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FPH : AT et Maladie pro, les nouvelles règles

En 2017, l'article 21 bis de la Loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires remplaçait le congé pour accident de travail par le Congé pour Invalidité Temporaire Imputable au Service (CITIS).

Pour la Fonction Publique Hospitalière, ce n'est que 4 ans plus tard qu'a été publié son décret d'application :

le Décret n° 2020-566 du 13 mai 2020 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique hospitalière qui insère un nouveau titre VI bis dans le Décret n°88-386 du 19 avril 1988 relatif aux conditions d'aptitude physique et aux congés de maladie des agents de la fonction publique hospitalière .

Ce décret réduit en théorie les marges de manoeuvre de nos directions pour refuser de reconnaitre les accidents de travail… tout en compliquant la reconnaissance des burn-out et des situations de harcèlement.

LES DOCUMENTS A REMPLIR

Ce qui ne change pas, ce sont les documents à fournir impérativement pour toute déclaration

  • L’imprimé de déclaration administrative, que l’employeur doit vous fournir dans les 48h
  • Le certificat médical initial spécifique à l’accident de travail ou maladie professionnelle. En cas d’arrêt de travail, celui-ci doit être transmis dans les 48h.

Par contre, le décret fixe des délais précis, ce qui n’était pas le cas avant.

Désormais, vous avez 15 jours après l’accident pour le déclarer avec ces documents, sauf dans les cas suivants :

Par exemple, si les symptômes n’apparaissent pas immédiatement, ou si le lien n’est pas fait sur le moment avec le service, vous avez jusqu’à 2 ans pour déposer le certificat médical, puis 15 jours pour faire la déclaration administrative. Cela signifie concrètement qu’un arrêt maladie ordinaire peut être requalifié en AT ou maladie pro jusqu’à deux ans après les faits, ce qui est un progrès par rapport à la jurisprudence précédente qui fixait un délai raisonnable de 1 an.

Ces délais sont contraints, mais finalement offrent plus de marge de manoeuvre que l’ancienne jurisprudence du délai dit « raisonnable » qui était d’un an. Néanmoins il est toujours souhaitable et préférable de réaliser les déclarations au plus près de l’accident, lorsque cela est possible.

L’acceptation du Congé entraîne le maintien du plein traitement, des indemnités familiales et de résidence jusqu’à son terme, quel qu’il soit. Le CITIS est considéré comme du service effectif, et rentrent dans le calcul des droits à avancement d’échelon et de grade.

Au terme du congé, le fonctionnaire apte à reprendre ses fonctions est réintégré dans son emploi ou, à défaut, réaffecté dans un emploi correspondant à son grade, le cas échéant en surnombre. Cela aussi est une nouveauté, et cet article doit être activé pour contraindre les directions à reclasser les personnels, même en l’absence de postes vacants !

LA PRESOMPTION D’IMPUTABILITE, KEZAKO ?

Toute déclaration d’accident de service ou de trajet, ou de maladie professionnelle, est désormais « présumée imputable au service ».

C’est la première grosse nouveauté. Derrière ce terme barbare, une avancée majeure : désormais, ce n’est plus à l’agent de prouver que son accident ou sa maladie professionnelle sont liés au travail, mais à la direction de prouver qu’il n’a AUCUN lien avec celui.

Pour ce faire, l’agent doit déclarer que l’accident remplit ces critères :

  • l’accident doit avoir eu lieu sur le temps et le lieu du service, en exerçant ses fonctions ou une activité qui en est le prolongement direct.
  • Pour les accidents de trajet, ils doivent avoir lieu sur le trajet direct et habituel ou bien relevant des activités relevant de la vie quotidienne.

ET APRES LA DECLARATION ?

Après la Déclaration, la direction peut :

  • Faire procéder à une expertise médicale, mais seulement si elle a des éléments concrets lui permettant de penser qu’il n’y a pas de lien avec le service. Elle ne peut faire procéder à cette expertise de manière automatique, sauf en cas de maladie non inscrite au tableau des maladies professionnelle
  • Faire procéder à une enquête administrative pour établir la matérialité des faits

La Commission de Réforme ne peut être saisie désormais que dans trois cas :

  • Lorsque la maladie ne respecte pas tous les critères des tableaux de maladie professionnelle
  • Lorsque la maladie n’est pas inscrite au tableau des maladies professionnelles
  • Lorsque l’administration a des éléments liés à une faute ou fait personnel du fonctionnaire qui peut détacher totalement l’accident ou la maladie du service

L’administration ne peut donc saisir la commission de réforme, source de retard important, que lorsqu’elle peut déjà établir qu’il n’y a AUCUN lien avec le service ou que l’accident résulte d’une faute. Elle ne peut donc plus être saisie automatiquement pour se défausser.

Pour preuve, cet extrait du Guide établi par le ministère de la Santé :

(image: extrait_guide_citis_dgos_2021.jpg)

Une des conséquences qu’il faudra mesurer est de savoir s’il serait possible, et intéressant de contester, pour excès de pouvoir, la décision de saisine de la commission de réforme.

Dans tous les cas, La direction a désormais des délais contraints pour décider : 1 mois en cas d’AT, 2 mois pour les maladies professionnelles.

En cas d’enquête administrative, ce délai total peut être porté à 5 mois. Tout retard dans ces délais entraine automatiquement le placement en Congé pour Invalidité Temporaire imputable au service (CITIS) qui vous garantit un maintien de salaire à 100%, prime de service comprise. Mais en cas de refus final, les maintiens de salaire peuvent être récupérés par l’administration.

UN PAS EN AVANT, UN PAS EN ARRIERE

Si la présomption d’imputabilité ainsi que les délais contraints pour que l’administration se prononcent sont de véritables avancées, elles sont à nuancer fortement. En effet, il n'y a pas de conséquences véritables à leur non respect, à par un placement conservatoire en CITIS.

Surtout, on enregistre un grave recul sur les maladies dites "imputables au service"

Jusqu’à présent, on pouvait faire reconnaître une maladie hors tableaux comme imputable au service dès que l’on parvenait à établir un lien direct et certain avec le travail. C’est ainsi que nous avons pu obtenir la reconnaissance de situations de burn-out et de violences psychologiques.

Désormais, cette reconnaissance ne sera plus possible que si la maladie entraine un taux d’Incapacité Permanente Temporaire (IPP) de 25%, ce qui est énorme. Celui-ci est proposé par la Commission de Réforme.

Le ministère aurait voulu dissimuler la souffrance au travail qu’il ne s’y serait pas pris autrement. Pour mémoire, pour obtenir un taux de 25%, il faut souffrir de troubles névrotiques, voire psychotiques, qui souvent ne permettent plus l’insertion professionnelle.

Si l’on prend la question actuelle des contaminations au COVID-19 en milieu professionnel, au vu des critères restrictifs pour le moment en vigueur (avoir été traité par oxygénothérapie ou assistance ventilatoire, il n’y a guère d’autre choix que de déclarer un Accident de Travail sous peine de voir sa demande certainement rejetée.

Les demandes de maladie imputable au service reconnues préalablement à la sortie du décret sont toujours valables et basculent dans le nouveau régime à l'occasion de leur prochain renouvellement.