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GUERRE, PANDÉMIE : LA POPULATION A PLUS QUE JAMAIS BESOIN DE PSYCHOLOGUES

Le Décret n°2022-195 du 17 février 2022 relatif à la prise en charge des séances d'accompagnement réalisées par un psychologue est paru. Il met en place un conventionnement de psychologues. Pour elles et eux, 8 séances pourront être prises en charge à hauteur de 30€, sur “adressage médical”. La paramédicalisation des psychologues est en marche !


Pouvoir technocratique sur le soin

et sanction pour les réfractaires

Le ministère a bien fixé les contours nécessaires à l’application de ce décret. Tout d’abord, il faut montrer patte blanche. Il y a des critères à respecter, des pièces justificatives à fournir. Et l’autorité compétente appréciera ou non la formation initiale ou continue et la pratique professionnelle des psychologues amenées à rejoindre le dispositif. Les voilà trié·es et contrôlé·es.
La sous-section 4 a trait aux sanctions encourues. Les psychologues (du dispositif de conventionnement avec l’assurance maladie) qui ne donneront pas satisfaction seront sanctionné·es. Comme elle est longue, cette sous-section. Le ministère prépare très soigneusement cette étape.
Prescription médicale = paramédicalisation
Et c’est un médecin qui adresse un·e assuré·e vers un·e psychologue. Le verbe « Adresser » est un néologisme qui viendrait en place de la prescription médicale initiale : l’illusion du libre choix de l’assuré·e est sauvegardée.
Le soin dans tout cela ? En tout 8 séances par année civile, à annoncer d’emblée au patient dont la première séance consiste en une évaluation. Bref, on commence par la fin, histoire de se mettre dans de bonnes conditions. Le processus thérapeutique respectueux de la temporalité de la personne n’est plus de mise, nous voilà pris dans l’injonction de l’immédiateté. Nous savons tout·es à quel point ces injonctions sont des nuisances pour la qualité des soins, pour l’instauration d’une relation de confiance, et au final pour l’amélioration des patient·es. Les voilà promu·es, les psychologues, super thérapeutes à l’efficacité redoutable. Les patient·es n’ont qu’à bien se tenir : 8 séances pour aller mieux, le compte à rebours est lancé !

Comment comprendre cela ? Pour comprendre le soin psychique, le ministère de la Santé galère. Ou plutôt, le ministère de l’Economie arbitre et tranche (violemment). Les thérapies les plus courtes sont aussi les plus compatibles avec les objectifs de restrictions budgétaires. Le soin doit coûter le moins cher possible… Mais est-ce que ça répond à la promesse faite aux patient·es : aller mieux et le plus vite possible ? La réponse est NON !
La mise en œuvre de dispositifs semblables, en Grande-Bretagne et ailleurs dans le monde anglo-saxon, n’a pas produit les résultats escomptés.
Et pendant ce temps-là, la psychiatrie publique et le secteur du médico-social sont laissés sans moyens…
Un paragraphe entier est consacré à la vidéotransmission. C’est le passage où est reconnue aux psychologues leur « libre appréciation » et autorisée une évaluation « au cas par cas ». Mais ça ne s’applique qu’à l’utilisation de cet outil novateur. Pas au nombre de séances. Et les psychologues ne devront pas trop se préoccuper de leurs patient·es au-delà du chiffre fatidique.

Sortie du dispositif

Quand les psychologues voudront sortir du dispositif, iels devront aller plus vite qu’à l’entrée puisque si l’autorité compétente dispose de quatre mois pour informer les professionnel·les de leur intégration (le silence valant rejet) : les professionnel·les devront annoncer leur départ « sans délai ».

Boycott du dispositif

Pour toutes ces raisons, beaucoup de psychologues et d’organisations représentatives, dont SUD santé sociaux et SUD collectivités territoriales, refusent la mise en place et l’intégration au dispositif « MONPSY ». Il répond à une vision restrictive, standardisée et budgétaire du soin. Rien ne va dans le sens d’une prise en charge d’une quelconque souffrance ou détresse psychologique.
Quel mépris pour la profession de psychologues et des personnes ayant besoin d’accéder à des soins psychiques ! Quelle attaque envers les savoirs-faire et les libertés de pratiques !
Et pendant ce temps-là, les services publics chargés de l’accès aux soins pour tout·es sont délaissés, négligés.

Les luttes continuent

Pour accueillir et traiter la souffrance psychique, le mal-être, nous revendiquons le renforcement de l’offre de soins des institutions publiques détentrices de savoir-faire sans cesse dénigré, et ce quel que soit leur champ d’exercice, psychiatrique, social, médico-social, judiciaire…

Pour la revalorisation des psychologues, leur reconnaissance, et aussi parce qu'iels se préoccupent avant tout du soin psychique et des personnes qui devraient en bénéficier sans obstacle, SUD Santé-Sociaux et SUD Collectivités Territoriales espèrent construire avec l’ensemble des collectifs et des syndicats, une mobilisation comme jamais la profession en a connue !.

La fédération SUD santé sociaux participe aux mobilisations unitaires des psychologues. Une plateforme revendicative commune reprenait notamment les revendications suivantes auxquelles nous nous associons :

  • La reconnaissance de la place des psychologues dans l’ensemble de leurs champs d’exercice : santé, social, médico-social, éducation, travail, justice, formation et autres ;
  • Le respect d’une pluralité d’approches tant théoriques que méthodologiques ;
  • L’arrêt de tout encadrement hiérarchique contraire aux statuts et missions des psychologues ;
  • Le refus de toute subordination au médical
  • Le refus de création d’un ordre professionnel pour les psychologues ;
  • L’augmentation des postes de psychologues dans toutes les structures de service public et du secteur social et médico-social ;
  • Le refus collectif des dispositifs prévoyant l’intervention des psychologues dans des conditions imposées et avec une rémunération dérisoire ;
  • Le refus de la paupérisation et de la précarisation de la profession : niveau de rémunération, contractualisation, temps incomplets pour les salariés et faible tarif pour l'activité libérale ;
  • Une revalorisation de la rémunération à la hauteur de la qualifications et des responsabilités ainsi qu’une harmonisation la plus favorable des grilles dans l’ensemble des conventions collectives et des trois versants de la fonction publique ;
  • L’ouverture d’une négociation sur la profession de psychologue, notamment sur les carrières, les rémunérations et les recrutements prenant en compte leurs différents champs d’exercice et leurs organisations représentatives.